la Conférence vire à la farce
Jean-François Bégin
La Presse
Madrid
Article du 17 novembre 2007
Le cannabis a beau être une substance dopante interdite, certains participants à la Conférence mondiale sur le dopage sportif donnaient l'impression d'en avoir abusé, hier.
Il était en effet tentant de se demander ce qu'avaient fumé certains délégués en observant les jeux de coulisses un brin délirants qui ont occulté les délibérations sur la nouvelle version du Code mondial antidopage, complètement éclipsées par la joute politique.
Au coeur de cette comédie burlesque: une banale querelle de succession. Laissés en plan le mois dernier par le retrait surprise du Français Jean-François Lamour, qu'ils soutenaient dans l'élection à la présidence de l'AMA, les gouvernements européens ont réclamé jeudi soir le report du scrutin, afin d'avoir le temps de présenter un nouveau candidat.
La date limite
Pas question, a rétorqué hier matin le président sortant, Dick Pound. La date limite pour le dépôt des candidatures était le 20 septembre, fin de la discussion. «Peu importe comment ils s'y prennent, les gouvernements vont se présenter à notre réunion de demain (aujourd'hui) avec un candidat. Que l'Europe soit d'accord ou non est sans importance.»
(Parenthèse: le conseil de fondation de l'AMA, qui élira le successeur de Pound, compte 36 membres: 18 issus du mouvement sportif et 18 autres, dont cinq Européens, des gouvernements. Au nom du principe de l'alternance, c'est au tour des États de sélectionner le patron de l'Agence. Les représentants sportifs ont indiqué qu'ils ne feraient qu'entériner le choix. Fin de la parenthèse.)
Une alliance pour Fahey
La réponse de Pound semblait paver la voie au couronnement de l'ancien ministre des Finances australien John Fahey, seul aspirant toujours sur les rangs. Inconnu au rayon antidopage et apparu dans la course à la dernière minute, M. Fahey est soutenu par une alliance regroupant les États-Unis, le Japon, la Nouvelle-Zélande et l'Afrique du Sud.
Puis, coup de théâtre. Au milieu de l'après-midi, le site internet de L'Équipe rapporte que le médaillé d'or du 110 m haies des Jeux olympiques de Montréal, le Français Guy Drut, se porterait candidat pour assurer l'intérim jusqu'en mai 2008. Membre du CIO, Drut est un ancien ministre des Sports et un proche de l'ancien président Jacques Chirac
Le président du Comité international olympique, Jacques Rogge, s'empresse d'endosser l'idée, mais le délégué américain au conseil de fondation, Scott Burns, n'est pas particulièrement impressionné. «Les règles sont les règles. Si une équipe gagne par un point quand la sirène finale retentit, devrions-nous ajouter 10 secondes ou un autre quart à la partie?»
Coincé par les journalistes dans le hall du Palacio Municipal de Congresos, Drut, «candidat du compromis», la joue modeste. «Si je peux rendre service, aider à clarifier la situation et amener un peu de calme, je le ferai sans aucun problème, parce que (cette élection) est trop importante pour que ça se règle de manière difficile», dit-il, affirmant avoir été approché le jour même par le Conseil de l'Europe. Petit problème: la secrétaire générale adjointe de l'organisation annonce peu après que le nom de Drut n'a en fait jamais été avancé!
«Rien de bon pour l'AMA...»
En conférence de presse, Dick Pound en est réduit à constater les dégâts. «Ce qui s'est passé n'était pas approprié. Ça n'apporte rien de bon pour (l'AMA) et encore moins pour l'Europe», dit-il, précisant, pour ceux qui en doutaient, que Fahey demeure candidat.
Quoi qu'il arrive aujourd'hui - et franchement, même les scénarios les plus farfelus ne sont pas à écarter - Pound n'a pas l'intention de prolonger son mandat, ne serait-ce que d'une minute, au-delà de sa date de fin prévue. «À 11h59, le 31 décembre, je vais probablement boire une grande gorgée de champagne.» On le comprend.
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