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CONTRE LE DOPAGE

Baseball «De 50 à 80 % des joueurs se dopent»

16 Mars 2009 , Rédigé par contre le dopage Publié dans #Baseball


Le grand déballage sur le dopage dans le base-ball américain a été repoussé. Le procès pour parjure et entrave à la justice dans une affaire d’usage de stéroïdes de Barry Bonds, ex-star des Giants de San Francisco et recordman des homerun (1), dont le démarrage était prévu aujourd’hui, a été ajourné. Il devait s’ouvrir quelques semaines après les aveux de dopage d’Alex Rodriguez, une autre ancienne gloire du «passe-temps favori des Américains».

Lance Williams, journaliste du San Francisco Chronicle, a effectué une longue enquête sur le dopage aux Etats-Unis (Game of Shadows, 2006) et particulièrement dans le base-ball. «Avant, j’étais un supporteur des Oakland Athletics. L’idée que des joueurs aient pu être dopés ne m’effleurait même pas. Au cours de mon enquête, je me suis rendu compte que la majorité des gars de cette équipe prenaient des stéroïdes. Depuis que je sais comment ça se passe, je ne regarde même plus le base-ball à la télé.»

Le dopage est-il très répandu dans les sports américains ?

Dans le basket-ball, il n’y a eu aucun scandale majeur. Mais dans le football américain et le base-ball, en revanche, l’usage de stéroïdes est extrêmement courant. Jusqu’à ses aveux, tout le monde considérait Alex Rodriguez comme le joueur le plus propre qui soit, capable de battre le record de Barry Bonds.

Quand les base-balleurs ont-ils commencé à se doper ?

Ils ne ressemblent à des catcheurs que depuis récemment. Traditionnellement, ils n’avaient pas vraiment de carrure, car les entraîneurs leur interdisaient de faire de la musculation. Ils craignaient que ça ne rigidifie leurs poignets, essentiels pour diriger la batte. Mais il s’est avéré que ces craintes n’étaient pas justifiées, et tout le monde s’est mis à la musculation dans les années 90. Les joueurs ont aussitôt été contaminés par la culture des stéroïdes, dominante dans les salles de muscu.

Le premier qui a reconnu en avoir utilisé est le batteur Ken Caminiti, juste après son départ à la retraite en 2001. On s’est alors mis à suspecter d’autres joueurs, mais pendant longtemps aucun athlète d’envergure n’a été inquiété. Les joueurs n’ont commencé à être contrôlés qu’en 2003.

Pourquoi si tardivement ?

Les syndicats de joueurs, très puissants, ont longtemps refusé les contrôles. Les propriétaires des équipes ont eux aussi longtemps traîné des pieds. Lorsqu’il a commencé à se doper, Alex Rodriguez était déjà payé une fortune… mais en voulait davantage. Aujourd’hui, les jeunes joueurs, eux, voient dans le dopage un moyen de parvenir au sommet. Ils se sentent poussés au dopage, car, si on prend deux athlètes de même capacité, c’est celui qui se dope qui finit par être pris dans l’équipe.

Quelle est la proportion de joueurs dopés ?

Selon Caminiti, la moitié. Un autre grand joueur repenti a estimé que 80 % prennent des anabolisants. La vérité est sans doute entre les deux. Les contrôles sont plus fréquents aujourd’hui, et la proportion a sans doute diminué. Le Congrès a fait pression sur les syndicats de joueurs et le commissaire du base-ball [élu par les propriétaires des équipes, ndlr], qui a imposé des tests et des sanctions plus fortes. On est cependant loin de la rigueur imposée aux athlètes des sports olympiques.

Quelle différence ?

Dans le base-ball, les contrôles n’ont lieu que pendant la saison, alors que les «olympiens» peuvent être testés n’importe quand. Les base-balleurs ne sont pas testés pour les hormones de croissance, et les sanctions sont minimes : trois mois de suspension pour un premier contrôle positif, quand un autre sportif en prendrait pour deux ans. Dans le base-ball, même s’il est avéré qu’un champion se dope, ses records sont maintenus. Dans les autres disciplines, les tricheurs doivent rendre leurs médailles. Dans le foot américain, les protocoles de test sont tout aussi accommodants.

Pourquoi une telle tolérance ?

Il y a une sorte d’entente tacite qui tend à balayer sous le tapis ces questions de dopage. Les syndicats refusent que les joueurs puissent être contrôlés à toute heure du jour ou de la nuit. Les joueurs sont bien payés et peuvent embaucher des avocats ou faire grève. Or, en cas de grève, les propriétaires perdent de l’argent, et donc cherchent à éviter les conflits.

Comment réagissent les supporteurs ?

Contrairement à ce qui se passe dans le football américain, où les cas de dopages ne soulèvent pas beaucoup de réactions hostiles, les supporteurs de base-ball n’aiment pas en entendre parler. Mais il ne semble pas que les affaires de dopage aient réduit le nombre de spectateurs dans les stades de base-ball ou de football. En 1994-1995, une grève des joueurs de base-ball de 232 jours avait tellement écœuré les supporteurs que le nombre de spectateurs avait chuté de plus de 20 % ! Paradoxalement, ce sont les stéroïdes qui ont remis en selle le base-ball : le nombre de homerun est monté en flèche. Tout le monde trouvait ça formidable, et les travées se sont remplies à nouveau. On sait maintenant que c’est grâce au dopage que les joueurs battaient tous les records… Depuis, le monde du base-ball vit dans la crainte d’un nouveau déclin en spectateurs, mais, malgré les dernières révélations, ces craintes ne se sont pas matérialisées.

D’où viennent les produits ?

Ils sont en grande partie fabriqués au Mexique, où ils sont légaux. Aux Etats-Unis, les stéroïdes sont illégaux [depuis 1990, leur possession sans ordonnance est punissable d’une peine allant jusqu’à sept ans de prison, ndlr], mais, il y a encore cinq ans, presque personne n’était poursuivi. On pouvait facilement en acheter dans les salles de musculation. Maintenant, c’est plus difficile.

Quels dopants sont utilisés ?

Au début, les athlètes utilisaient des anabolisants injectables découverts par les bodybuilders et les haltérophiles dans les années 50. Mais ces produits sont facilement détectables. Ils se sont ensuite tournés vers des produits plus difficiles à détecter, comme les hormones de croissance. Ils utilisent aussi de la testostérone. Dans mon enquête sur le laboratoire Balco, j’ai découvert qu’un de leurs produits était indétectable car c’était un stéroïde inventé afin de réduire la graisse des bœufs de boucherie, et personne n’avait pensé à faire un test pour le détecter !

(1) Le coup parfait qui permet au batteur de faire le tour des bases


Source et date de l'article Liberation.fr  02.03.09

Source de l'image

 


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N
Merci pour l'article ! On a longtemps cru en effet que le baseball n'était pas vraiment touché par le dopage.  Ces chiffrent font sauter !  Et dire que les fans ont manifesté et ont exprimé leur colère durant la grève (dont on avait beaucoup parlé) et, pourtant, même s'ils savent (oui ils savent) que les joueurs sont dopés, ils y vont quand même et applaudissent.  50 à 80 % ! Les chiffres sont effarants.
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